Castelnau-le-Lez rassemblement pour défendre le chêne vert bicentenaire avril 2021 (©JPV)
Castelnau-le-Lez rassemblement pour défendre le chêne vert bicentenaire avril 2021 (©JPV)

Janine est une habitante du quartier autour de la rue de Salaison, côté carrière, en bas du futur Clos des Oliviers à Castelnau-le-Lez. Elle n’y laisse plus ses petits-enfants libres de faire du vélo : « c’est devenu un piège mortel, » ballets incessants de camions de chantier « une quarantaine par jour […] c’est une épreuve de voir ça. » 

La barbarie de l’urbanisation à la parcelle montre son vrai visage : l’indifférence. Devant une opposition au projet qui se montre trop pertinente, le promoteur fait jouer ses prérogatives par voie de justice, agitant son permis de construire. Normal, le maire le lui a donné. Il a donc saisi un juge civil avec comme assignation : l’interdiction de tout rassemblement dans la rue de Salaison, se plaignant que depuis le 4 mars, des manifestants l’empêchent de travailler.

Jeudi 22 avril : « le juge a retenu les arguments du promoteur, et a condamné les manifestants à indemniser le préjudice du promoteur, du fait de ce prétendu blocage, à hauteur de 10.000€ dont 5.000€ de dommages et intérêts, » explique Alexia Roland, avocate des 15 personnes assignées en justice, pour avoir bloqué le chantier. Sans compter une astreinte de 2.000€ par jour, par infraction. C’est-à-dire que tout individu qui « se mobilise pour prendre la défense de cet arbre est susceptible d’être sanctionné à hauteur de 2.000€. Évidemment, un appel sera fait de cette décision, » précise Maître Roland.

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Tout avait été soigneusement orchestré pour calmer les administrés un tantinet trop éveillés. En renfort, des vedettes :  Thomas Brail fondateur du GNSA (Groupe National de Surveillance des Arbres) disait même vouloir s’attacher dans le chêne pour le sauver. Pragmatiques et rassurants avec Sylvain Dujardin, un expert de l’ONF, ils avaient expliqué que tout allait bien se passer : « taille-douce […] l’arbre et ses racines affleurantes seront protégés ». Après réflexion, l’efficacité des solutions semble avoir été surestimée, il faudrait peut-être revoir la méthode pour réellement sauver le chêne. Mais voilà, temps et argent, le modèle économique s’impose, tout s’enchaîne. Va-et-vient de camions. Sans protection le chêne est bousculé, les paroles se sont envolées, et les pins qui bordent le chantier sont en train de mourir, l’un d’entre eux est déjà mort.

Métropole de Montpellier, Castelnau-le-Lez, avril 2021

17h30, le 26 avril, Christophe Menichetti de l’association « Le chêne et handicap de Salaison » tenait une conférence de presse, devant la mairie de Castelnau-le-Lez accompagné d’Alexia Roland, avocate. Une cinquantaine de personnes était présente, avec la presse, la police municipale, et même la DGSI qui prenait quelques notes. Les membres de l’association souhaitent rencontrer le maire, échanger, trouver des solutions en urgence, devant l’implacable réalité d’un chantier qui montre ses vrais impacts sur le quartier et la nature.

« On est persuadé qu’il va devoir agir »

Il y avait de l’émotion cette fois, dans la voix de Christophe Menichetti sur les marches de la mairie. Et concernant le maire de la ville Frédéric Lafforgue : « pour l’instant, il n’a toujours pas agi. On est persuadé qu’il va devoir agir. C’est sa responsabilité, c’est l’urgence écologique. Il ne pourra pas faire autrement. » Espoir légitime. Certes, même une situation désespérée peut changer.

Côté famille Bedos Menichetti, on pense que les enjeux ne prennent pas en compte que « l’Homme est un animal vulnérable, dès qu’il abîme la biodiversité qui l’entoure » comme l’expliquait Laurent Ballesta, photographe naturaliste venu soutenir la mobilisation pour le chêne et les grands capricornes qu’il abrite, une espèce rare de coléoptères protégée. Plus emblématique : la situation de handicap de M. Bedos, trop souvent oubliée dans cette affaire. Cela resterait aussi un problème où : voirie, promoteur et collectivités n’auraient pas encore proposé de solutions viables.

Côté mairie, il s’agit d’un blocage, et d’un refus des propriétaires à mettre en œuvre les mesures techniques préconisées par l’ONF, pour que les travaux puissent se poursuivre sereinement. Pour Frédéric Lafforgue : « l’objectif de la municipalité a toujours été d’agir pour préserver le chêne. »

C’est peut-être rapidement oublier, l’historique et le contexte de ce chantier. Entre la métropole de Montpellier qui gère la voirie, avec un vice-président membre du comité de l’arbre dont la compétence s’arrête aux frontières de Montpellier, et une mairie qui a signé le permis de construire en un temps record en 2014, l’équation laisse entrevoir toute la fragilité ou l’inefficacité de l’autorité politique. Étonnant, quand tout le monde se revendique de l’écologie politique. L’écologie n’est-elle qu’éléments de langage pour les élections ? Comment, en 2021, un permis de construire peut-il devenir un permis de détruire ?

[VIDEO] Mairie de Castelnau-le-Lez, avril 2021 : Christophe Menichetti et Janine Dureau :

 

[VIDEO] Explications avec Maitre Alexia Roland :

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