Il y avait de la joie sous le vieux chêne. Et de l’espoir surtout. Oublié le froid ! Ce mardi 8 décembre au soir voulait fêter Anathémis. Maintenant le bicentenaire a un nom, c’est : Anathémis. Et le vieil arbre est devenu : « arbre remarquable. »
L’association A.R.B.R.E.S. : Arbres Remarquables, Bilan, Recherche, Études et Sauvegarde décerne la labellisation « arbre remarquable » en collaboration avec le ministère de l’Écologie. Ils sont 30 en Occitanie, et 5 sur le département de l’Hérault à avoir été ainsi distingués. Un label qui n’offre aucune protection juridique, juste un engagement moral, pour un respect du patrimoine collectif. Alors, c’était jour de fête à Castelnau-le-Lez pour saluer un avenir, enfin raisonnable.
Anathémis le chêne aura besoin de forces, pour affronter les mois qui viennent. Souhaitons que son baptême l’y aide avec ce nom composé d’Antonin et Anais les arrières petits enfants de la famille Bedos, et Thémis la déesse de la justice et de l’équité.
Bientôt Anathémis subira un « petit » toilettage, rien de grave disent les experts. « Des coupes sans dangers » et “l’arbre et ses racines affleurantes seront protégés.” C’est “de la taille douce. » Opération faite : « on est à 4 mètres [de hauteur ndlr], donc ça pourrait le faire. » Et si cela ne suffit pas : « au pire ce que l’on peut faire, c’est mettre un système de hauban, tirer la branche de là, à là-haut, avec un système de traction, pour encore rehausser les branches et les relâcher quand le chantier sera fini, » expliquait Thomas Brail, du Groupe National de Surveillance des Arbres (GNSA), en novembre dernier. Très bien, engins de travaux et camions pourront passer. Et on renouvelle le process pour chaque aménagement et déménagement, des futurs habitants de la résidence du « Clos des Oliviers » ?
VOIR AUSSI, [VIDEO] Castelnau-le-Lez : le chêne, le promoteur, et la responsabilité politique
« On ne me remarque pas trop. Pourtant, je symbolise l’humanité dans ce dossier »
Vastes questionnements, qui laissent entrevoir toute la complexité du dossier de cette voirie encore en terre de la rue de Salaison. Et il y a M. Bedos en situation de handicap, qu’il ne faut pas oublier. Le petit chemin agréable devant sa maison verra naître un nouveau flux de circulation qui devra composer, avec les normes d’accessibilités des personnes handicapées. L’étroitesse et la végétation riche du lieu laissent dubitatif sur les solutions adéquates, à mettre en place.
« On ne me remarque pas trop. Pourtant, je symbolise l’humanité dans ce dossier […] L’accessibilité doit être universelle. J’aimerais que le chêne soit le symbole de ça, puisqu’il m’a protégé contre l’agression d’un promoteur et de la mairie de Castelnau, » témoigne Christian Bedos.
VOIR AUSSI, [VIDEO] Castelnau-le-Lez : la barbarie de l’urbanisation à la parcelle ?
Interview de Christian Bedos, bénévole de l’association France Handicap, habitant de la rue de Salaison et propriétaire du chêne Anathémis :
Interview de Karine Menichetti, avocate et membre de la famille Bedos : « notre combat c’est un chêne et surtout, et avant tout, le handicap »
VOIR AUSSI, [VIDEO] Urbanisation : Castelnau-le-Lez, à la recherche d’un nouvel équilibre
Décision politique et absurdité
Il est peut-être un sol qu’il faut venir fouler plusieurs fois, que l’on soit Président ou vice-président de métropole pour comprendre toute l’absurdité, et le danger que peut engendrer une décision politique. La gestion de la cité est un art qui s’aiguise au contact du réel. La politique pour de vrai, ne reste pas coincée entre communication, et dépliant de campagne électorale.
S’ils étaient motivés par ce baptême : voisins, collectifs, associations, sympathisants et responsables politiques, n’en ont pas moins été traités « de glands. » Comprendre : idiots, imbéciles, abrutis, andouilles, ou demeurés. Tourné en dérision, dans une volonté d’apaisement par Christophe Menichetti qui défend son oncle Christian Bedos dans cette affaire : « ce soir, vous avez tous un diplôme, vous êtes tous des glands, » lance avant la photo de groupe, l’organisateur de la soirée. Puis il cite les propos de l’ex-maire de Castelnau-le-Lez, où Jean Pierre Grand dénonce dans un journal papier local : « le comportement de quelques bobos politisés qui inventent une histoire, et la font prospérer politiquement est affligeant. Ce bel arbre est dans une propriété privée, où aucune construction n’est programmée, il n’a jamais été menacé. » Péremptoire, comme pour faire oublier sa propre responsabilité, et tenter de les faire passer pour des hurluberlus, le sénateur ose tout.
« Je n’ai jamais vu autant de glands sous un chêne. »
Terrible condescendance, que ne devrait pas s’autoriser la classe politique. Le sénateur Jean-Pierre Grand s’épanche concernant l’affaire de la rue de Salaison à Castelnau-le-Lez : « je n’ai jamais vu autant de glands sous un chêne. » Bref, armé d’humour, un M. Grand apodictique, dont le niveau du propos livre en revanche une autre évidence et une nécessité absolue : il ne faut pas laisser les élus s’encroûter dans leur fonction. Le renouvellement est un bien-être vital à l’ensemble de la société. Car pour un certain personnel politique, comme disait Georges Brassens, « le temps ne fait rien à l’affaire. »
Comportement loin d’être anodin, qui pose sur le passé et le présent une multitude d’interrogations sur nombre de mandats, et qui remet alors au goût du jour, la célèbre réflexion du général de Gaulle, à propos de Philippe Pétain, le maréchal : « la vieillesse est un naufrage. » Des propos du général, riches de sens à l’époque, comme de nos jours, pour tenter de comprendre avec ces mots : quand un politique atteint « sa majestueuse lassitude, » et se retrouve livré « aux manœuvres de gens habiles » ?
La Confrérie Des Glands : « il vaut mieux un bon gland qu’un mauvais Grand »
Il y a des hashtags justiciers : #ConfrérieDesGlands pourrait devenir l’un d’entre eux. Présente, énergique, Dominique Nurit, conseillère municipale à Castelnau, et conseillère départementale reste positive et incisive : « le gland, c’est un joli fruit […] ce n’est pas quelque chose qui nous gêne, on va créer la Confrérie des Glands […] il vaut mieux un bon gland qu’un mauvais Grand. » Plus provoc, mais dans l’humour aussi, Luc Jennepin photographe lance : « pour que les glands poussent, il faut un gros fumier. » S’il croyait l’enterrer, Jean-Pierre Grand risque bien de donner un nouvel élan à cette affaire.