Et pour vous, le premier mai, avec ou sans muguet ? Certains soupirent de lassitude ou ronchonnent avec le retour du 1er mai et des diverses fêtes du muguet. Ils ne voient là qu’un marronnier : expression végétale et dédaigneuse employée par les travailleurs de l’écrit et du papier. Autrement dit un événement récurrent sans intérêt.

Ont-ils les neurones empêtrés par les habitudes ou hyper excités par une succession de buzz médiatiques ? Souvent des pseudo-événements, pourvoyeurs d’adrénaline. Peut-être vaudrait-il mieux qu’ils récurrent leurs neurones plutôt que d’ignorer les cycles saisonniers et leurs vertus en général apaisantes dans un monde mutant et angoissant pour un nombre croissant de ses citoyens. Nous ne faisons pas la sieste sous les marronniers, ce n’est pas encore les saisons des marrons !

Pour certains, la paix est hélas insupportable, peut-être que la sérénité ne fait, pas ou trop peu, partie de leur expérience vécue. D’autres trouvent dans les rituels festifs l’occasion de se reposer, de recharger leurs batteries plus sollicitées que jamais, de se ressourcer.

Les manifestations d’insatisfaction et de colère ne sont pas sans rappeler mai 1968. L’ampleur d’un changement à venir aurait-elle la même amplitude ? Et le changement le même objet ? Si mai 1968 marquait la revendication puis l’acquisition d’une plus grande liberté, qu’en serait-il de mai 2018 ? Le bruit court, la rumeur gronde et s’amplifie : les libertés et les acquis sociaux durement acquis au XXe siècle sont menacés, attaqués. Il faut donc se mobiliser vigoureusement pour les défendre de nouveau. Mai 2018 serait alors un réveil de cette mémoire collective culturelle et citoyenne. Quand même, bien des choses ont changé en cinquante ans. N’y aurait-il pas une autre forme de perte de liberté à craindre ?

Allons-nous passer à l’étape suivante de l’évolution déshumanisante qui est déjà à l’œuvre ? Le réflexe de solution technologique semble un peu automatique. Un problème ? Pas de souci nous allons développer rapidement une application technologique. La technologie est-elle donc devenue l’Avenir de l’Homme ? Et la perte de son humanité une fatalité ?

Ou allons-nous, en conscience, mettre impérativement la technologie au service de l’Homme ? La souffrance et la pauvreté effectivement présentes, observables au quotidien dans les pays occidentaux dits riches et évolués  -dont la France fait partie- témoignent-elles d’un clivage, d’une indifférence ou d’une impuissance à résoudre les problèmes en intégrant toutes les dimensions (humaine, écologique, économique) ? Ou bien, la souffrance et la pauvreté témoignent-elles d’une volonté aveugle et en partie inconsciente du mal qu’elle génère, de vouloir tirer profit de Tout et de tous ?

Les acteurs de mai 1968 écrivaient déjà : « Nous voulons les structures au service de l’homme et non pas l’homme au service des structures, avoir le plaisir de vivre et non plus le mal de vivre ».

Mai 2018 marquera-t-il un tournant vers une amélioration significative ? Il apparaît que l’amélioration doit passer par un décloisonnement mental, un passage des mentalités du clivé, du cloisonné vers le global. Global ne signifiant pas nécessairement mondial, mais intégral. Intégral, du latin integralis dérivé de integer qui signifie « entier, intègre ».

Reconnaître les difficultés actuelles pour les intégrer dans une recherche la plus large possible de solutions qui respectent l’intégrité des êtres et de l’environnement. Aujourd’hui on sait que l’environnement c’est la planète. On a retrouvé là-bas, au loin tant de déchets jetés ici, à côté. Cela semble un réel et grand défi tant les habitudes de penser et de faire comme par le passé sont ancrées. Si la remise en question relève de chacun, les projets et leur mise en œuvre sont nécessairement collectifs. Il faut ajouter à ce processus souvent tumultueux, la patience nécessaire à la mise en place concrète des changements au niveau matériel.

D’abord, croire que c’est possible. Pour cela, éviter de se positionner d’emblée comme un incrédule à l’imagination décrépite. Deux des slogans de mai 1968 s’énonçaient : « L’ennemi du mouvement, c’est le scepticisme. Tout ce qui a été réalisé vient du dynamisme qui découle de la spontanéité. » Et encore : Soyez réalistes, demandez l’impossible. Aujourd’hui il se dit et se répète « Tout est possible » comme remède au blocage de l’imagination et donc aux solutions concrètes qui en découlent. Certains projets peu médiatisés s’inscrivent avec succès dans une stratégie qui prend en considération, l’Homme et ses besoins, la planète et la dimension économique dans un équilibre respecté et respectueux.

Revenons au joli mois de mai, ce mois vibrant à l’effigie du muguet, celui où les fleurs volent au vent, celui des poètes, des jardiniers, des amoureux de la vie, de ceux qui prennent le temps d’apprécier la nature ou de fêter le printemps. Ils y retrouvent la joie authentique du lâcher-prise avec le travail ou une nostalgie heureuse, le parfum suave des clochettes innocentes, une ambiance sereine et familière. Alors, un brin de muguet Messieurs, Dames ?

Chanson « Le temps du muguet » interprétée par Francis Lemarque :

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