Nous, correctrices et correcteurs grévistes du baccalauréat 2019, avons remis hier nos copies au rectorat de Montpellier. Soutenus par plus de 300 manifestants déterminés, nous tenons à exprimer notre sidération.

Ce matin, le ministre a réitéré ses menaces illégales et mensongères, en individualisant notre action pourtant strictement collective, et en affirmant sans précision que certains avaient commis des choses graves… Nous ne laisserons rien passer et nous rappelons que notre action s’inscrit dans le strict cadre du droit constitutionnel à la grève.

Au-delà du contenu profondément inégalitaire des réformes de l’éducation, ce qui est en jeu, c’est la démocratie sociale. Le gouvernement rêve de grèves invisibles et sans conflit. Or, précisément, le conflit social constitue l’essence de la démocratie et la visibilité de la grève en est une condition. Contrairement au vocabulaire scandaleux utilisé de manière dominante (notamment la trop fameuse « prise d’otages »), notre action se contente simplement de défendre par la grève l’intérêt des élèves et du personnel de l’éducation. C’est tout et c’est beaucoup.

De nombreux enseignants ayant participé aux jurys ou refusé de siéger ont pris conscience de l’attaque brutale dont ils sont victimes, ainsi que leurs élèves. Non seulement, leur opinion ne compte pas, mais au-delà, ils se sont aperçus que le gouvernement bafoue sans vergogne leur conscience professionnelle, en les obligeant à enfreindre le code de l’éducation. Sommés de mettre de fausses notes à certains candidats au baccalauréat, ils s’indignent et résistent.

Notre mouvement gagne en popularité et personne ne peut affirmer sans mentir que les profs ne pensent qu’à leur intérêt particulier. Nous sommes en train de renverser le discours dominant car notre lutte porte sur des valeurs centrales : la liberté d’expression et l’égalité entre les élèves. Il est profondément inquiétant de réaliser que ce gouvernement menace ces valeurs, dont la République pourtant se réclame en paroles.

En cherchant à enfermer les débats dans la complexité technique, le ministère joue un jeu honteux. Les réformes dans l’éducation ont en réalité un contenu politique simple et dangereux : il s’agit de renoncer à l’idée même de service public au profit d’intérêts privés, soit financiers, soit individualistes. L’élève est sommé de devenir un consommateur devant un menu complexe, dont le sens lui échappe en partie. En outre, la qualité du savoir en pâtit, car chaque enseignant, pour défendre sa discipline, doit la rendre la plus attrayante possible et rentrer en concurrence avec ses collègues. Nous appelons donc tous les élèves et leurs familles à défendre leur liberté, c’est-à-dire leur droit inaliénable à l’éducation et aux études supérieures après le baccalauréat.

Nous considérerons toute sanction individualisée comme une menace collective et une procédure politique. Le personnel de l’éducation est concerné dans son ensemble, et, au-delà, c’est l’ensemble de la société qui est en train de prendre conscience que la question de l’école est centrale et n’est pas une simple affaire de spécialistes, ou, pire, d’experts. Nous ne nous arrêtons pas car nous savons que nous avons ouvert une porte : une autre école est possible, nous sommes en train de la construire. C’est le sens de cet acte 1.

Les correctrices et correcteurs grévistes mobilisés à Montpellier et leurs soutiens.

Premiers signataires :

  • Séverine Maingaud
  • Sarah Hillion
  • Valérie Adamy
  • Laurie Klin
  • Paul Hamel
  • Véronique Pinet
  • Véronique Négret
  • Sophie Brousse
  • Salomé Bour
  • Astrid-Maria Mendonca-Mendes
  • Marine Tregan
  • Thérèse Dainat
  • Marie Cilia
  • Stéphane Dailly
  • Laetitia Graves
  • Rémy David
  • Eric Hassenteufel
  • Thomas François
  • Delphine Delambre
  • Marion Tragnan
  • Frédérique Butard
  • William Vey

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