[Édito] Gilet Jaune, que reste-t-il de nos amours ? La question peut sembler, à la fois sans intérêts et passée de mode… N’a-t-on pas vu fleurir partout que le mouvement était, si ce n’est fini, ou tout du moins condamné à ne pas voir fleurir la nouvelle année ?
On le sent, le malaise est toujours présent. Et si une certaine « intelligentsia » bouffie de mépris et d’arrogance appelle « au calme » – avec quelques pincées de sel et de poivre -, espérant peut-être, par-là, que les plus influençables, rentreront dans le rang et reprendront leurs rôles de citoyens godillots et d’électeurs pour les quelques élections occasionnelles qui parsèment la vie humaine, l’immense majorité semble attentive à ce qui s’est déroulé, depuis que la fin de l’automne s’est couverte de jaune, au détriment d’un orange, trop souvent transactionnel.
Beaucoup râlent, devant les blocages et les actions des gilets jaunes. En vrai, on les comprend. Il n’y a rien de drôle à rester bloqué deux heures dans un rond-point ou à frôler la faillite par les retards ou les annulations de ses clients. Mais ce mouvement de révolte n’est-il pas nécessaire ?
La question n’est pas inutile. Et, elle n’est pas assez posée. Pourquoi se révolte-t-on, aujourd’hui ? Hier, cela avait, pour certains, plus de sens, la vie était plus dure et l’existence plus terne.
Mais, aujourd’hui ? Et bien aujourd’hui, la vie est toujours aussi dure pour celui qui n’a pas la mondialisation heureuse, qui galère et en souffre. Et, si certains « Chiracs » en ont dénoncé « le bruit et l’odeur », le gilet jaune n’a commis aucun crime, à moins que la pauvreté n’en soit un ? Le gilet jaune aurait-il dû perdre son âme dans une pensée complexe et jupitérienne ?
Aujourd’hui, ce sont des ronds-points et quelques mobilisations, mais demain, quels seront les fruits de la révolte ? Peut-être est-ce là, le plus dérangeant, avec les gilets jaunes, puisque réapparaît la figure de l’imprévu. Et c’est cela qui semble le plus choquant. Souffrons-nous donc de la peur du changement ?
Oui, il se passe quelque chose et la société remue, et peut-être pour la dernière fois, face aux remèdes des barbiers-chirurgiens, gavés de libéralisme béat et d’économie dérégulée….
N’est-ce pas positif ? Discuter seul, sans opposition, sans propositions opposées, n’est-ce pas le meilleur moyen de prendre de mauvaises décisions ? Peut-être, faudrait-il, aujourd’hui, écouter, et non pas juste entendre les gilets jaunes. Ce qu’ils disent n’est pas vain, même si parfois, le ton et la forme n’y sont pas.
Ils rêvent d’une société plus juste et plus équitable, n’est-ce pas ce que nous souhaitons tous ?